L’idée de causalité a longtemps suscité débats chez les philosophes et les savants. La tendance prédominante actuelle semble être plutôt à l'éviter, à la faveur des relations fonctionnelles et des descriptions systémiques. Toutefois, la recherche didactique a montré la présence forte dans le raisonnement commun des explications causales. Dans cette recherche, j’analyse quelques tendances du raisonnement causal utilisé en physique par les élèves, en utilisant questionnaires et entretiens concernant la mécanique des solides et des fluides, en impliquant au total environ 250 élèves, 170 étudiants et 36 enseignant. Les différences entre raisonnement commun et usage scientifique sont mises en évidence, avec des suggestions pour l'enseignement. J’ai mis en évidence trois aspects, qui sont connectés entre eux et avec les habitudes de pensée de la vie courante : une confusion entre cause efficiente et contingente, entre les conditions d'occurrence d'un phénomène et la cause le produisant directement ; une tendance à déplacer ou délocaliser les causes ; une difficulté à connecter les causes locales et les effets globaux. Ces aspects sont liés : un manque d’analyse des détails locaux peut entraîner à donner un regard global ne distinguant pas bien les endroits spécifiques où les interactions agissent et donc à délocaliser ou déplacer les forces et les causes, ce qui peut engendrer une confusion entre ce qui déclenche ou provoque un phénomène et ce qui effectivement le produit. Les élèves et plus en général la pensée commune, pour comprendre une situation physique, ne semblent pas se satisfaire de l’application de lois formelles et de relations fonctionnelles. Ils expriment l'exigence d’une explication causale, d’un mécanisme, qui puisse rendre compte de la dynamique de faits et effets qui a amené à un certain état des choses. Cela entraîne aussi une critique sur l'attitude diffuse dans l'enseignement de privilégier fortement les situations statiques ou stationnaires, traitées avec des règles et formules a-causales, visant les calculs et les procédures algorithmiques plutôt que la compréhension. Le raisonnement commun, au contraire, pose l'exigence d'expliquer comment une situation d'équilibre ou stationnaire se constitue et raisonne surtout en termes de changement. Ces tendances de raisonnement devraient être prises en compte dans l’enseignement, non seulement comme des obstacles, mais aussi comme des ressources dont l’apprenant dispose, à utiliser dans une dynamique positive de développement conceptuel.
Causalité et explications dans la physique enseignée et dans la pensée commune : calculer et comprendre.
BESSON, UGO
2005-01-01
Abstract
L’idée de causalité a longtemps suscité débats chez les philosophes et les savants. La tendance prédominante actuelle semble être plutôt à l'éviter, à la faveur des relations fonctionnelles et des descriptions systémiques. Toutefois, la recherche didactique a montré la présence forte dans le raisonnement commun des explications causales. Dans cette recherche, j’analyse quelques tendances du raisonnement causal utilisé en physique par les élèves, en utilisant questionnaires et entretiens concernant la mécanique des solides et des fluides, en impliquant au total environ 250 élèves, 170 étudiants et 36 enseignant. Les différences entre raisonnement commun et usage scientifique sont mises en évidence, avec des suggestions pour l'enseignement. J’ai mis en évidence trois aspects, qui sont connectés entre eux et avec les habitudes de pensée de la vie courante : une confusion entre cause efficiente et contingente, entre les conditions d'occurrence d'un phénomène et la cause le produisant directement ; une tendance à déplacer ou délocaliser les causes ; une difficulté à connecter les causes locales et les effets globaux. Ces aspects sont liés : un manque d’analyse des détails locaux peut entraîner à donner un regard global ne distinguant pas bien les endroits spécifiques où les interactions agissent et donc à délocaliser ou déplacer les forces et les causes, ce qui peut engendrer une confusion entre ce qui déclenche ou provoque un phénomène et ce qui effectivement le produit. Les élèves et plus en général la pensée commune, pour comprendre une situation physique, ne semblent pas se satisfaire de l’application de lois formelles et de relations fonctionnelles. Ils expriment l'exigence d’une explication causale, d’un mécanisme, qui puisse rendre compte de la dynamique de faits et effets qui a amené à un certain état des choses. Cela entraîne aussi une critique sur l'attitude diffuse dans l'enseignement de privilégier fortement les situations statiques ou stationnaires, traitées avec des règles et formules a-causales, visant les calculs et les procédures algorithmiques plutôt que la compréhension. Le raisonnement commun, au contraire, pose l'exigence d'expliquer comment une situation d'équilibre ou stationnaire se constitue et raisonne surtout en termes de changement. Ces tendances de raisonnement devraient être prises en compte dans l’enseignement, non seulement comme des obstacles, mais aussi comme des ressources dont l’apprenant dispose, à utiliser dans une dynamique positive de développement conceptuel.I documenti in IRIS sono protetti da copyright e tutti i diritti sono riservati, salvo diversa indicazione.